Lafcadio Hearn alias Koizumi Yakumo ラフカディオ・ハーン (小泉八雲)
Dans les pas de l'écrivain voyageur
Né d'un père irlandais et d'une mère grecque en 1850 sur l'île ionienne de Leucade, Lafcadio Hearn est un écrivain voyageur particulièrement apprécié au Japon. Par sa vie et ses récits, il est le meilleur des guides pour qui souhaite découvrir l'archipel nippon sous le prisme de la littérature de la fin du XIXe siècle.
Une nouvelle vie au Japon
Abandonné très tôt par ses parents, Lafcadio Hearn est élevé au Pays de Galles par une tante. Devenu borgne à l'adolescence suite à un accident, Hearn est rapidement livré à lui-même. En 1869, il arrive seul aux Etats-Unis, où, après de nombreux petits boulots, il devient reporter à Cincinnati dans l'Ohio. Après s'être installé à la Nouvelle Orléans puis en Martinique, il embarque pour le Japon à l'âge de 39 ans. À son arrivée à Yokohama le 4 avril 1890, Hearn éprouve un coup de foudre pour l'archipel qu'il exprime en ces mots :
"...la ville toute entière, la baie et les montagnes qui la ceinturent, l'ensorcellement blanc du Fujiyama, surplombant le tout dans un ciel sans nuages, le Japon, tout entier, en vérité, avec ses arbres magiques et son atmosphère lumineuse, avec toutes ses îles, ses villes, ses temples, et ses quarante millions d'êtres les plus aimable de l’univers" (Pélerinages japonais, 1894).
Adorateur quelque peu nostalgique du Japon ancien, il s'attache, dans son œuvre prolifique et ses rencontres, à sonder l'âme japonaise qu'il perçoit subtile et empreinte de spiritualité. Il recueille des histoires de fantômes du folklore japonais, publiées peu de temps avant sa mort en 1904 dans son livre "Kwaidan ou Histoires et études de choses étranges". Le réalisateur Masaki Kobayashi adapte quatre de ces contes surnaturels dans un film fantastique du même nom sorti en 1964 ; frissons garantis !
Séjour à Matsue
Il est engagé très rapidement comme enseignant à Matsue (département de Shimane, dans l'ouest de Honshu) où il rencontre son épouse, Koizumi Setsu. Malgré un séjour assez court de quinze mois dans la cité, Matsue regorge de lieux rappelant l'écrivain. Située au nord du château, sa résidence, ancienne maison de samouraïs au joli jardin japonais traditionnel, conserve son bureau où il commence à écrire "Kwaidan" et "Pèlerinages japonais".
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Son arrière petit-ils, Bon Koizumi, dirige le musée commémoratif adjacent. Il est le premier musée dédié à l'auteur ; ouvrant tout juste trente ans après la mort de Hearn. Rénové en 2016, il expose de nombreux documents et objets relatifs à sa vie et son œuvre. D'autres signes de la présence de l'écrivain britannique sont dispersés dans la ville : un buste de Hearn dans un petit parc de la rue Shiomi Nawate, sa silhouette de dos portant ses valises marquées de ses initiales en bas-relief sur une façade dans le quartier de Kyômise, une splendide sculpture de Massaki Noda en forme de coeur symbolisant l'ouverture d'esprit de Hearn au bord du lac Shinji, etc...
Kumamoto, Kobe et Tokyo
Hearn s'installe à Kumamoto à la fin de l'année 1891 pour occuper un nouveau poste de professeur. N'y ratez pas sa maison aux sols en tatamis et l'autel qu'il y fit installer après s'être converti au bouddhisme. En plein centre ville, la demeure et son petit musée propose des informations en japonais et en anglais. En 1894, Lafcadio Hearn devient journaliste pour le Kobe Chronicle. La bibliothèque du Travail de la préfecture de Hyôgo à Kobe présente une stèle portant son visage sculpté sur sa façade. Précisons qu'Hearn occupa plusieurs logements avec sa famille à Kobe ; cet édifice, aujourd'hui bibliothèque, est l'un d'entre eux.
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En 1896, Hearn est nommé professeur de littérature anglaise à l'université Impériale de Tokyo puis à l'université de Waseda. Cette même année, il est naturalisé japonais et prend le nom de Koizumi Yakumo ; démonstration ultime de son profond attachement à la culture nippone et sa parfaite intégration. Il s'établit dans le quartier de Shinjuku (près de Shin-Okubo), où l'on trouve aujourd'hui un parc commémoratif Koizumi Yakumo. Ouvert en 1993, ce petit parc de 1 500 m2 dans un quartier résidentiel rend hommage au pays natal de Koizumi, la Grèce. Il est tout à fait surprenant de trouver au cœur de Shinjuku des pavements de mosaïques et des colonnes antiques ! Koizumi décède en 1904, et ses cendres sont placées au cimetière bouddhique Zôshigaya, non loin de sa résidence.
Le Japon se souvient de Lafcadio Hearn
Après un premier séjour à Yaizu en 1897, Koizumi y passe ses derniers étés, occupant l'étage de la maison d'un marchand de poissons. La maison en bois et aux tuilles vernissées datant de 1868 a été déplacée et reconstituée au parc architectural Meiji Mura près de Nagoya. À l'emplacement de l'ancienne maison, une stèle rappelle les fréquentes visites de Koizumi et sa famille.
Un musée mémorial a ouvert ses portes en 2007 dans la cité balnéaire où vous pouvez découvrir des photographies, des objets personnels, des lettres, des manuscrits et des dessins du romancier. La municipalité propose même un petit circuit touristique pour découvrir les monuments commémoratifs à travers la ville et les lieux préférés de Koizumi (plage, temples).
L'archipel dispose d'encore bien d'autres lieux liés à l'écrivain comme le musée d'art d'Ikeda à Minami-Uonuma qui dispose d'une salle entièrement dédiée ou la bibliothèque Lafcadio Hearn de l'université de Toyama qui conserve sa bibliothèque personnelle composée de plus de 2 000 ouvrages. Enfin, pour les fans absolus, il est possible de résider une nuit à Kotoura (préfecture de Tottori) dans le ryôkan où Koizumi et son épouse passèrent leur lune de miel !