Le Nihon Mingei-kan de Tokyo, musée de l’artisanat populaire 日本民芸館
Le beau dans l’utile
En 1936, dans le quartier de Meguro à Tokyo, l’écrivain, philosophe et collectionneur, Soetsu Yanagi (1889-1961) désireux de mettre en lumière la beauté des objets artisanaux du quotidien, fonde le Mingei-kan, musée de l’artisanat populaire japonais. Le maitre mot des lieux : découvrir la beauté dans l’ordinaire.
La pensée de Soestu Yanagi
Au milieu des années 1920, le penseur tokyoïte, Soetsu Yanagi, définit le mouvement artistique mingei valorisant l’artisanat populaire issu de traditions ancestrales. Il écrit à son propos : "Il doit être modeste mais non de pacotille, bon marché mais non fragile. La malhonnêteté, la perversité, le luxe, voilà ce que les objets Mingei doivent au plus haut point éviter : ce qui est naturel, sincère, sûr, simple, telles sont les caractéristiques du Mingei". Ce penseur était déjà connu pour sa participation en 1910, alors qu’il était encore étudiant, à la création de la revue Shirabaka autour de laquelle s’était constitué le mouvement littéraire du même nom.
Bol à thé de Shoji Hamada
Crédit: Courtesy of The Estate of Shoji Hamada/York Museums Trust via Wikimedia Commons.
Son goût pour la céramique coréenne l’avait ensuite entrainé vers les chemins de l’artisanat populaire en 1924, en aidant activement à la création d’un musée d’art populaire en Corée. En 1925, en collaboration avec les céramistes Kanjiro Kawai et Shoji Hamada, il créé le terme "mingei" à partir des mots minshû (peuple) et kogei (artisanat) ; le mingei était né.
À lire : La maison de Kanjiro Kawai
Le projet d'un homme
Dès
1926, Yanagi avance l’idée de créer un musée assurant la promotion des œuvres
mingei. Il débute alors une collecte d’objets à travers l’archipel, guidé par
un objectif précis : la recherche de "belles choses". Dans cette quête, il
s’intéresse à la beauté sans fard et sans superflu des objets artisanaux
élaborés par des artisans ordinaires, des hommes du commun. Selon le précepte
qu’il a théorisé, il admire la beauté des objets ordinaires et utilitaires
quotidiens. L’implication de Yanagi dans le projet muséal est totale. Il
conçoit le bâtiment principal ; des extérieurs aux aménagements
intérieurs.
En bois et en pierre d’Oya (roche magmatique de la préfecture de Tochigi), celui-ci est enregistré comme Bien Culturel matériel du Japon depuis 1999. Fidèles à ses préceptes, Yanagi s’emploie à utiliser des techniques et des matériaux artisanaux dans l’édifice de style japonais. À côté de celui-ci, la résidence de Yanagi est ouverte à la visite, vous pouvez y découvrir son bureau avec sa bibliothèque, une salle de musique dédiée à sa femme, la salle à manger mêlant style occidental et style traditionnel japonais.
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De tout l'archipel
Parmi les 17 000 œuvres du musée ouvert depuis 1936, figurent des céramiques, des œuvres textiles, en verre, en fer, en bambou tressé, des peintures, des laques, des sculptures en bois de la période Heian (794-1185) à la période contemporaine ; des oeuvres récoltées dans tout le pays. Le musée met également en lumière des artisanats particuliers de l'archipel comme l'art populaire d’Okinawa. Des costumes tissés aux motifs complexes et des sculptures témoignent de la richesse et de la diversité de la culture aïnoue. En outre, il possède une impressionnante collection d'oeuvres de Kanjiro Kawai (potier), Bernard Leach (céramiste anglais), Shōji Hamada (céramiste), Shikō Munakata (peintre), Keisuke Serizawa (artisan textile) ; figures clés du mouvement mingei. Le Nihon Mingei-kan, la parfaite harmonie du beau dans l'utile.

Costume ainu du 19ème siècle
Crédit: http://www.mingeikan.or.jp