Visiter Tokyo dans les pas de Hokusai (1760-1849)
Le fou de dessin
Se surnommant lui-même le "fou de dessin" (gakyôjin), Hokusai est l’artiste japonais le plus célèbre à travers le monde. Créateur prolifique, ses œuvres rencontrent rapidement une certaine notoriété au Japon mais également en Occident dès la fin du XIXe siècle. Lancez-vous sur ses traces à travers la mégalopole tokyoïte.

Auto-portrait de Hokusai en vieil homme
Crédit: Wikimedia Commons
Le maître du paysage
Après un apprentissage dans l’atelier de Katsukawa Shunshô (1726-1793), il se forme aussi bien aux styles des écoles de peintures classiques japonaises qu’aux techniques Chinoises et Occidentales. Inventant son propre style d’ukiyo-e (estampes japonaises), il réalise des portraits d’acteurs ou de belles jeunes femmes, des caricatures, des images d’oiseaux et de fleurs et atteint l’excellence dans ses paysages. Tout au long de sa carrière, il signe de plus de 120 pseudonymes différents les milliers d’œuvres.
Le Mont Fuji depuis la Sumida-gawa
Utilisant le bleu de Prusse, récemment introduit au Japon, avec virtuosité, il rend un vibrant hommage à la montagne sacrée dans son chef d’œuvre ; les Trente-six vues du mont Fuji (1830-1833). L’innovation réside ici en la répétition du sujet selon de multiples points de vue, différents moments de la journée et des compositions audacieuses. Dans plusieurs de ces meisho-e, vues de sites célèbres, Hokusai représente le mont Fuji depuis plusieurs quartiers et monuments de la capitale.
Lire : Le mont Fuji
Dans la 31ème vue de la série, le pont Nihonbashi à Edo, le sommet enneigé du mont Fuji, au fond à gauche, émerge dans la brume. Point de départ des routes du Tokaido et du Kisokaido (ou Nakasendo) en plein cœur d’Edo, ce pont, bâti en 1603, est emprunté quotidiennement par les nombreux marchands environnants et les cortèges officiels dont on aperçoit les visages et chapeaux sur le pont à peine visible. Deux autres ponts célèbres de la capitale, maintes fois illustrés dans les ukiyo-e, figurent dans la série : le Mannen-bashi et le Ryōgoku-bashi.
Dans les deux œuvres, le mont Fuji n’est qu’un petit triangle au loin ; le reste de l’image étant animé par des scènes de vie quotidienne (pêcheurs et embarcations). Dans ce périple, vous pouvez également vous rendre au temple Higashi Honganji d'Asakusa, représenté par Hokusai dans la 4ème vue. Fondé en 1591 dans le quartier de Kanda, puis transféré à son emplacement actuel après le grand incendie de Meireki en 1657, ce temple logeait les délégations coréennes de la dynastie Yi accueillies par le shogunat Tokugawa. Si vous souhaitez admirer son fronton si hardiment figuré par Hokusai, il n’est qu’à 10 minutes à pied de la station Asakusa.

Le village de Sekiya sur la rivière Sumida, avec le mont Fuji en arrière plan (ca.1830-1832)
Crédit: ukiyo-e.org
Le mont Fuji encore et toujours
Saviez-vous que l’établissement Mitsukoshi à Nihonbashi existait déjà à l’époque d’Edo ? C’est incroyable mais vrai ; il est le plus ancien grand magasin de Tokyo. Hokusai le représente bel et bien dans la 21ème estampe de la série. Certes celui-ci a bien changé; mais fondé en 1673 par le marchand de tissus, Takatoshi Mitsui, il occupe son emplacement actuel à Nihonbashi depuis 1683. L’histoire raconte que cet endroit offrait la meilleure vue sur le mont Fuji de tout Edo !
Entre 1834 et 1840, Hokusai réalise une seconde série consacrée au mont Fuji ; ne comptant pas moins de cent vues ! C’est dans l’une de celles-ci qu’il dépeint l’observatoire astronomique du quartier d’Asakusabashi, dans lequel le géomètre Inô Tadataka (1745-1818) débute sa formation. Apercevoir aujourd’hui le mont Fuji depuis ces différents sites de la capitale est tout bonnement impossible, tant la ligne d’horizon de Tokyo est obscurcie par de nombreux et impressionnants gratte-ciels. Néanmoins en prenant de la hauteur depuis certains observatoires, comme la tour Tokyo SkyTree, le mont Fuji se révèle aux curieux ; encore faut-il que la brume ne le dissimule pas !
Sur les traces d’Hokusai
Vous ne pouvez marcher dans les pas d’Hokusai à Tokyo sans visiter son musée. Ouvert en novembre 2016 à proximité de la station Ryôgoku, le musée Sumida Hokusai est implanté dans le quartier de naissance et vie de l’artiste. Au-delà des nombreuses œuvres exposées, le musée présente également une statue en taille réelle d’Hokusai travaillant dans son atelier avec sa fille O-Ei. Cette scène, en diorama, figure également dans les collections du musée Edo-Tokyo. Pour vous rendre de l’un à l’autre, vous pouvez même emprunter la Hokusai-dori (rue Hokusai). Enfin, le temple Seikyô-ji, petit temple d’Asakusa dissimulé entre les habitations, abrite sa tombe.
Lire : Le musée Sumida Hokusai
Culture populaire
La culture populaire s’est tout naturellement appropriée ses œuvres et son nom. Hokusai est partout : mangas, anime (Miss Hokusai), café et même au parc Disneyland Tokyo où un restaurant porte son nom !

Le musée Sumida Hokusai à Tokyo
Crédit: divisare.com